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Novembre 2014 Sous la pluie. C’est toujours l’automne dans la cité. Retour d'une distribution de "soupe populaire" sous une pluie battante. A Nice quand il pleut, c'est fort.Ca remet les idées en place et les pendules à l'heure. La solidarité n'est pas soluble dans la flotte, ça au moins j'en suis sûr. Et là nous sommes tous des bénévoles, sans grades ni titres... Tous sauf le Curé de la ZUS de l'Ariane, qui est le leader (de droit divin ?) de l'association. Un homme fabuleux, ancien de la Croix-rouge, brancardier dans les Balkans... Pas pour rien que son association se nomme MIR. C'est l'espoir et la paix en Serbo-Croate. ( http://www.codani.info/Mir.html ) Une jeune musulmane avec 4 enfants en bas âge (dont un bébé) sans nulle part où aller. Larguée complètement. Il faut faire face. Déjà un bol de soupe chaude, ensuite... On verra. Une autre, catholique, qui a une crise mystique en plein milieu de la distribution alimentaire. Elle crie que Dieu est avec elle et que tous ceux qui la suivront seront au chaud et au sec ce soir. Elle n'a pas un sou, mais elle crie qu'elle paiera l'hôtel à tous. Et elle part, seule, sous la pluie. Le petit groupe de lycéens et les étudiantes en médecine, venus "pour voir" prennent ça en plein visage. Une vraie claque au milieu de l'orage. Il faut expliquer, sans entrer dans le détail médical, que "ça arrive". C'est la misère, la vraie, la totale. Celle qui devient tellement insupportable que la folie devient acceptable à la place. Ce que cette femme a crié à la foule (plus de 100, 150 plus les bénévoles) c'est ce qu'elle ferait. Ce qu'elle ferait si elle en avait les moyens. Elle le veut tellement qu'elle le délire, debout, devant nous. Ce n'est pas dangereux, mais c'est spectaculaire. Dans un monde parfait, on l'aurait envoyée à l'hôpital, au chaud et au sec. Mais là, pas moyen de la stopper. Même "Médecins du Monde" qui a un fourgon avec nous, a préféré laisser partir. Pas la place aux urgences, et tous les foyers pour femmes sont bondés à 21h00. A quoi bon ? La pluie la calmera. Le froid n'est pas encore assez fort pour la tuer, et elle a eu de quoi manger. Reste le risque de suicide, mais c'est marginal. Une bonne crise de larmes, sous un pont, ce sera probablement la seule suite... En relisant ce que je viens d'écrire, je trouve celà cynique, désabusé. Et pourtant... C'est bien ce à quoi je viens d'assister, ce à quoi j'ai participé, très modestement. Une simple et petite flamme dans la nuit de la misère. Une flamme un peu seule, mais qui est là. Essayons d'y penser le soir, quand nous entendons le vent et la pluie au lieu de la télévision. P.S. : Ceux qui ne sont pas d’accord avec moi peuvent m’écrire. Je réponds volontiers dès que j’ai le temps, et souvent le samedi. A suivre... En automne... encore... Copyright (c) 2005 - 2014 Didier Codani. Tous droits réservés. |