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Mars 2014 Les raisins du squat Raisins ou raisons, squat ou colère ? Qui sait… En tous cas la question revient une fois de plus, et cette
fois ce n’est pas à la une de votre site
internet favori, c’est à celle du plus grand quotidien des Alpes-Maritimes. Très belle étude de deux pleines pages ce 28 février 2014 à
acheter en vitesse chez votre buraliste préféré, en attendant ou en espérant
qu’elle soit mise en ligne. Mais pourquoi tant de pages ? C’est que le sujet
intéresse, et surtout qu’il pose problème. Il n’est pas le cœur du problème, il n’est qu’un effet,
qu’une conséquence visible. A moins d’un mois maintenant des élections municipales la problématique du logement et celle de
la sécurité urbaine s’invitent dans la campagne. A Nice, peu ou prou, pratiquement tous les candidats ont des
réponses convenues et sensiblement identiques. Sur le logement
on se retranche sur les 800 logements construits par an, dont 400 logements
sociaux. Ce n’est pas rien, il faut le reconnaitre. C’est réel, c’est concret. Les challengers en rajoutent un peu, mais juste un peu, 200
en moyenne, histoire d’annoncer mille. Mille, ça ne veut rien dire, mais c’est
plus que ce qui se fait actuellement, et c’est facile à retenir. Tant pis si on
ne dit pas le moins du monde où on pourrait bien trouver le terrain pour bâtir
et l’argent pour financer. Or nous manquons cruellement des deux. Comme il y a 10.000 demandes en attente, se focaliser sur un
dixième permet de gagner du temps. Pendant ce temps on ne parle pas des causes : -
Les réseaux qui alimentent en migrants intra ou
extra Européens -
Les réseaux qui répartissent et
« placent » les « sans – papiers » -
L’atonie de la réponse pénale à l’incivisme et
aux incivilités -
Le manque de fonds disponibles pour construire -
Le manque de fonds pour entretenir/réparer/rénover -
Le manque de terrains Manque de fonds et de
terrains, incivisme et flux de migrations mal contrôlés. On ne peut pas s’y
réduire de façon simpliste, mais c’est un socle dur auquel il faut s’attaquer. Ici et là au fil des programmes on trouve tout de même des
pistes, en cherchant bien. Sur tout ce qui
touche à la sécurité, un point fait l’unanimité ou presque :
Nice a la première Police Municipale de France, et pas qu’en effectifs.
En qualité de service rendu aussi. Plusieurs candidats s’en attribuent la paternité, le Maire
sortant en premier et non sans raisons. Ceux qui ne peuvent en être les pères
(surtout quand ils ont voté contre) essaient maintenant d’en être les amants. Bref, que ce soit pour se l’attribuer, ou pour la
complimenter afin de mieux la « réorienter », cette Police Municipale
donne le sentiment qu’elle pourrait être une solution à l’un des problèmes. C’est vrai qu’avec 380
agents sur 10 postes de Police, et près de 1.000 caméras suivies, ça
compte. Mais pour des raisons aussi idéologiques que juridiques,
c’est précisément cette force de l’ordre qui est la plus entravée, la plus
encadrée, la plus limitée dans ses attributions. La Police Nationale et la Gendarmerie ont les attributions…
Mais pas les effectifs ! La Police Municipale a les effectifs… Mais pas
les attributions ! Et comme nous sommes en France, chacun campe sur son
pré carré et ses prérogatives, ce qui n’aide pas vraiment à avancer. Autre point commun à quelques candidats : la prise de conscience du rôle actif des citoyens dans l’assainissement des quartiers. Bien entendu, il ne manque
pas d’idéologues pour dénigrer les « voisins vigilants » et en faire
un rappel des « heures les plus sombres de notre histoire » en se
délectant d’anecdotes sur la délation. Ceci avec d’autant plus de facilité que
les pères de ces braves gens étaient tout juste nés au cours des années 1940… « Ce qui leur donne par conséquent le
droit d’en parler ». Passons sur ces positions d’idéologues de centre-ville. Un
quart d’heure dans la vraie vie fait vite comprendre que la solidarité
active entre voisins respectueux des lois de la république est, avec une
bonne Police Municipale à proximité, une saine approche des problèmes. Un meilleur budget de la Police Nationale ne serait pas de
trop. Mais en avons-nous les moyens au niveau national ? Cette question
dépasse le cadre municipal. Un meilleur contrôle aux frontières de l’espace Européen ne
serait pas du luxe. Mais en avons-nous seulement la volonté au niveau
européen ? Là, c’est l’Etat qui est dépassé, voire doublé... C’est facile de faire pleurer dans les chaumières à la vue
des naufragés en mer, mais il faut savoir qu’arrivés sur la terre ferme (en
Europe occidentale de préférence) ces braves gens réclameront comme un dû à la
fois un logement et de la nourriture. Et il faudra bien les trouver pour eux,
le raccompagnement à la frontière étant de l’ordre du symbole. Il ne s’agit pas de lancer une quelconque « chasse à
l’étranger », mais simplement d’être lucides sur les conséquences d’une
politique trop ouverte de gestion des frontières. Restons au niveau
local, et en matière de sécurité locale le maintien d’une police à
proximité immédiate, en concertation avec des citoyens attentifs, impliqués
dans la vie de leur quartier est certainement une des positions les plus
raisonnables à laquelle on puisse se rallier. Pour rester équitable et pas trop négatif, gardons en
mémoire que sur ces 5 à 6 dernières années c’est tout de même une centaine de
squats qui ont été évacués, et pas qu’à l’unité, par immeubles entiers parfois.
Mais la hausse des interpellations d’un mandat municipal à un autre (+300%) montre à la fois l’efficacité
des services et la progression du problème. Ce n’est pas mince, c'est inquiétant. Pour en re-venir au
squat, il faut bien savoir aussi qu’il n’est pas possible d’attribuer un
logement social, en France, à une personne en situation irrégulière. Le logement est un droit, mais pour ceux qui
respectent nos lois, à commencer par celles qui régissent l’entrée sur notre territoire. Cette population qui ne peut accéder au logement social se
retrouve « sous les ponts » (regardez sous les ponts, vous serez
surpris de voir à quel point ça reste vrai) et « à la rue ». « A
la rue » c’est le cas de ceux qui n’ont pas de réseau de soutien, de ceux
qui ne savent même plus contacter le 115 (SAMU Social). Les autres… Ils squattent ! Et le plus facile pour squatter, c’est encore
le parc social, qui subit donc en premier et de plein fouet ce fléau. En l’absence (ou en carence) d’une réponse pénale forte et claire au niveau national ou Européen l’afflux continue et vient bloquer l’attribution légitime de logements à des français et à des étrangers en situation régulière. D’où toute l’importance qu’il y a et qu’il y aura à
dissuader les « irréguliers » et les squatteurs de venir en France en
général, et à Nice en particulier, car le parc existant ne permet plus de faire
face sans lutter fortement contre la vacance et les squats.
Avec quel argent ? C’est le point cardinal du débat. Toutes les prises de position lisibles sur le sujet tournent
autour de ce point. Certains ont la franchise de l’aborder et de proposer une option : Passer d’un office départemental à un office municipal en vendant du patrimoine, et en particulier tout patrimoine hors de Nice. C’est une option. On est pour ou contre, mais c’est effectivement une option. Pas forcément inepte puisque lors de la précédente
élection municipale niçoise le candidat qui a gagné avait déjà proposé presque
la même chose. S’il ne l’a pas - ou peu fait - ensuite c’est peut-être tout
simplement que c’est techniquement trop difficile, ou économiquement peu viable.
Les plus gros impayés ne sont pas forcément dans les villes et villages hors de
Nice. Se priver de logements rentables en les cédant (s’ils trouvent acquéreur)
reste à réfléchir et affiner à moyen ou long terme. Un autre candidat annonce glorieusement que s’il est élu (Moi Président… c’est une astuce qui a bien marché ailleurs...) il obtiendra de la Région PACA de quoi financer. C’est magnifique, on se demande juste pourquoi avoir tant attendu. Et en quoi la Région – qui effectivement aide certains élus – se sentirait obligée de suivre cette promesse qui n’est pas la sienne. On se
demande aussi pourquoi cette annonce ne se retrouve pas dans le projet final du
candidat. Un projet taillé en langue de bois massif qui évoque des concepts
toujours flous « parcours
résidentiels transparents et fluides » ou « l’accélération des
procédures », « un meilleur entretien », « des plans
d’intervention très réactifs », « une meilleure sélection des
prestataires »… Monsieur de La PALISSE se sentirait revivre à cette saine
lecture. Sans oublier le pompon « un temps de réponse maximum de cinq jours pour tout problème ». Si avec ça vous n’êtes pas contents, c’est que vous êtes bien difficiles… Un seul problème : C’est de la sémantique pure. Vous croyez qu’on va s’occuper de vous ? Bien sûr. Vous recevrez un SMS / Texto / Mail / coup de fil en moins de 5 jours, et il y sera écrit qu’on a bien noté votre problème, et qu’on s’en occupe… Merci. On le fait déjà ! N’importe qui sait le faire. On paie un « call center » à
Pondichéry (Inde) ou à Dunkerque (France) et on aura même plus à vous entendre
expliquer vos difficultés ; Et on vous répondra depuis Pondichéry ou
Dunkerque, qu’on s’en occupe, et en moins de 5 jours peut-être !!! Mais c’est
du vent. Le vent d’une communication politique à la mode. Ca a au moins le mérite de lisser l’électeur - locataire dans le sens du poil. C’est toujours mieux que de limiter le programme à « mettre fin à la préférence étrangère
en matière de logements sociaux ». Là, on touche un peu le fond. D’abord, pour le vivre de l’intérieur, c’est faux. Dans le plus grand office de la Côte d’Azur même il n’y a
pas de « préférence étrangère ». C’est une méconnaissance totale de
la procédure d’attribution. Ce n’est pas non plus exempt d’arrière-pensées xénophobes. Soyons francs et disons-le : Ce ne sont pas des propos de responsable, mais des propos de bateleur pour laisser croire qu’on privilégierait les étrangers (avec carte de séjour, puisque les autres n’ont droit à rien) au détriment des Français. On part d’un principe de bon sens « Les aides sociales, comme d’ailleurs les logements sociaux, doivent bénéficier à ceux qui en ont le plus besoin et qui peuvent légitimement prétendre à cette solidarité publique locale », et on débouche sur une conclusion spécieuse. Chacun jugera dans l’isoloir ce qu’il faut en penser. Il est vrai
que « plus c’est gros et mieux ça passe » mais on est bien loin de la
réalité du terrain. Les attributions de
logement, tous les candidats voudraient mettre la main dessus, et tous
parlent d’une « opacité » ou de « discrétionnaire » sans
jamais prouver ou démontrer quoi que ce soit. Il n’y a aucun cas concret à
l’appui. S’il y avait seulement un, il y a longtemps qu’il aurait fait la joie des tribunaux et la une des gazettes, mais il n’y en a pas. C’est
juste un bruit qui court. Et c’est une course de fond, on en entend parler
depuis des années sans que personne ne sorte du brouillard pour franchir la
ligne d’arrivée. Arrêtons là pour le moment, le plus croustillant reste encore
à
venir et à écrire. Pensons aussi que
derrière tous ces propos souvent attrape-gogos il y a un vrai problème de fond :
le décalage croissant entre la hausse des demandeurs de logements (sociaux ou non) et la baisse de
l’offre, en zone fortement touristique. Il y a aussi des hommes et des femmes qui travaillent depuis
des années pour aider à entretenir le cadre de vie de leurs concitoyens les
moins nantis, et on les insulte en douce. Il y a aussi depuis des années des gens qui attendent
légitimement un logement, et on les prend un peu pour des imbéciles. Il y a enfin des gens "à la rue", sous les ponts, dans la
misère, sans papiers, et on les oublie trop souvent, voire même on les méprise. Ce sont tous des êtres humains. C’est à eux que le titre de ce petit mot est dédié, en
hommage à l’œuvre de Steinbeck, sur un sujet somme toute assez proche. En se souvenant aussi de ce texte, apocryphe, placé par
Jean
Larteguy en préface de son ouvrage "Les centurions" (1960), attribué à Marcus Flavinius, Centurion à la 2e Cohorte de
la Légion III Augusta, sensé écrire à son cousin Tertullus, à Rome : « …Je t’en prie,
rassure-moi au plus vite et dis-moi que nos concitoyens nous comprennent, nous
soutiennent, nous protègent, comme nous protégeons nous-mêmes la grandeur de
l’Empire… » Laissons ce fragment de texte incomplet, pour que les plus érudits s’y penchent et aillent à la conclusion logique. Tel quel, ce fragment
est déjà plus que suffisant pour tous ceux qui vivent et travaillent au quotidien
dans nos
Zones Urbaines Sensibles et autres Zones de Sécurité Prioritaire. A suivre... Copyright (c) 2005 - 2014 Didier Codani. Tous droits réservés. |